RÉFORME DE L’ORTHOGRAPHE – Un Ă©change houleux a eu lieu, ce samedi 20 mai, sur le plateau de « On n’est pas couchĂ© », sur France 2, entre l’ex-ministre de l’Education nationale, Najat Vallaud-Belkacem, et, la chroniqueuse de l’émission, Vanessa Burggraf. Cette dernière expliquant Ă l’ancienne ministre que dans l’école de sa fille il fallait Ă prĂ©sent Ă©crire le mot oignon en Ă´tant le i et que cela Ă©tait dĂ» Ă la « rĂ©forme de l’orthographe » qu’elle avait mise en place. Qu’en est-il vraiment ?
D’où vient cette « réforme » ?
Une « réforme » initiée par un gouvernement socialiste, mais pas par Belkacem
Cette « rĂ©forme » a Ă©tĂ© initiĂ©e par Michel Rocard, en 1989. Alors Premier ministre socialiste, sous la prĂ©sidence de François Mitterrand, celui-ci dĂ©cide de mettre en place une nouvelle institution, le Conseil supĂ©rieur de la langue française. Cette institution a pour vocation de conseiller le gouvernement sur « les questions relatives Ă l’usage, Ă l’amĂ©nagement, Ă l’enrichissement, Ă la promotion et Ă la diffusion de la langue française ». Michel Rocard fait d’ailleurs aussi partie de ce Conseil, dont il est le prĂ©sident. Le Conseil comprend 22 membres, dont le SecrĂ©taire perpĂ©tuel de l’AcadĂ©mie française et le SecrĂ©taire perpĂ©tuel de l’AcadĂ©mie des sciences.
L’inspecteur de l’Éducation nationale, parmi les experts chargĂ©s d’élaborer le projet de la « rĂ©forme »
Lors de la première rĂ©union du Conseil supĂ©rieur de la langue française, Michel Rocard dĂ©cide de faire Ă©laborer un rapport d’amĂ©nagements orthographiques pour pallier certaines anomalies et absurditĂ©s de la langue française. Un groupe d’experts est alors choisi pour effectuer cette tâche. Il est notamment composĂ© de l’inspecteur gĂ©nĂ©ral de l’Éducation nationale, Jacques Bersani, du chef correcteur du journal Le Monde, Jean-Pierre Colignon, ainsi que par des lexicographes et des linguistes.
L’Académie française n’est pas à l’initiative du projet
Au printemps 1990, le projet, Ă©laborĂ© par les experts, est validĂ© par le Conseil supĂ©rieur de la langue française, et le 3 mai 1990, l’AcadĂ©mie, qui n’a pas encore entre ses mains le projet final, valide dans un premier temps les idĂ©es directrices de ce projet. Les textes sont finalement publiĂ©s dans les Documents administratifs du Journal officiel de la RĂ©publique française en date du 6 dĂ©cembre 1990.
L’Académie réfute toute notion de « réforme » et préfère parler de « rectifications ».
Après avoir eu connaissance de l’intĂ©gralitĂ© du projet, lors de la sĂ©ance en date du 10 janvier 1991, et après de vives discussions sur le sujet, l’AcadĂ©mie confirme son approbation mais Ă©met toutefois certaines rĂ©serves. Elle invite Ă la mesure et Ă la prudence dans la mise en Ĺ“uvre des mesures prĂ©conisĂ©es et ne se dit pas favorable Ă une imposition autoritaire de l’usage. L’AcadĂ©mie rappelle aussi qu’il ne s’agit pas d’une « rĂ©forme » de l’orthographe mais uniquement de « rectifications », et « dans tous les cas, les deux graphies – la graphie actuelle et la graphie proposĂ©e par le Conseil supĂ©rieur – devront ĂŞtre admises ».